mardi 29 mars 2011

Libye 2011 et Iran 1953.

Nous commençons à devenir familiers du schéma qui s'applique à quasiment toutes les guerres que l'Occident a conduites depuis plusieurs décennies: d'abord une émotion mondiale, unanimement partagée; puis une urgence politique; enfin, l'intervention de l'Occident dans un cataclysme de déflagrations, de métal déchiqueté et de béton pulvérisé.



Depuis la première guerre en Irak, nous suivons nos bombardiers en direct et nous voyons le front avancer en direct, jusqu'à approcher la capitale. Aujourd'hui, les rebelles butent à Syrte. Quels rebelles exactement ? L'opinion a été abreuvée de ce terme depuis des mois avec la révolution Tunisienne... mais quels sont ces rebelles Libyens dont on apprenait qu'ils avaient abattus par erreur un de leurs avions ? Quels rebelles passent en quelques jours; des bâtons et des pierres, aux avions de chasses ? Surtout, notre pays ayant été le premier a reconnaître politiquement ces révolutionnaires, après que Bernard-Henri Lévy les a rencontrés, dans quelle alliance sommes-nous donc désormais engagés ?

L'histoire des derniers conflits m'a appris à me méfier systématiquement dans les temps qui accompagnent le déclenchement d'une intervention à l'étranger... Les armes de destruction massives en Irak, Al-Qaïda en Afghanistan, les couveuses débranchées par les soldats de Saddam au Koweït, les "nouveaux camps de la mort" en Serbie... tout nous indique que la seule attitude raisonnable quand tous les doigts se pointent vers un dicateur en criant "les Droits de l'Homme !", c'est celle du scepticisme et du doute.

Un premier élément conforte celui qui demeure circonspect devant les raisons qui poussent à intervenir: l'interview d'un chef rebelle Lybien par le journal Italien Sole 24 Ore. L'interview, ignorée par les média Français, est consultable sur le site Anglais du Telegraph. On y apprend qu'Al-Hasidi a recours à des soldats d'Al-Qaïda; on y apprend également que ce Jihadiste fut un des leaders du Libyan Islamic Fighting Group. Ceci est confirmé dans le Washington Times également:
A former leader of Libya’s al Qaeda affiliate says he thinks “freelance jihadists” have joined the rebel forces, as NATO’s commander told Congress on Tuesday that intelligence indicates some al Qaeda and Hezbollah terrorists are fighting Col. Moammar Gadhafi’s forces.

Ce groupe armé synthétise toutes les ambiguïtés des mouvances proches d'Al-Qaïda: à la fois soutenu par des services Occidentaux (MI6 Anglais), tout en étant mis sur liste noire par l'ONU pour terrorisme; toujours est-il que la récente résolution 1973 votée à la hâte établi de fait un soutien armé à cette mouvance !

Un second élément conforte nos doutes: Khaddafi a fait publiquement état de ses intentions de nationaliser le pétrole en 2009 (voir ici). On comprend donc bien que les sympathies de nos pays pour un tyran de plus, trouvent aujourd'hui leurs limites en Libye, alors qu'elles perdurent et prospèrent sous d'autres contrées tout aussi tyranniques mais plus accommodantes en terme d'exploitation pétrolière: Bahreïn, mais surtout l'Arabie Saoudite.

Mais surtout, ce dernier élément nous permet de faire un parallèle intéressant et pertinent avec un événement géopolitique singulier: le coup d'état orchestré par les USA contre Mossadegh en 1953 en Iran. Ce dernier, démocratiquement élu, avait décidé de nationaliser le pétrole. Sa chute ne tarda pas, aprés des émeutes dont nous apprendrons plus tard qu'elles étaient financées par la CIA via l'Opération AJAX. Les Etats-Unis ont reconnu il y a quelques années, soit un demi-siècle plus tard, leur implication dans cette destitution...

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